Une déception à la mesure des enjeux...

Par une prise de position du 22.11.2017 le CNOM refuse de se saisir de la question de la prescription de l'action disciplinaire, non sans susciter une certaine incompréhension. 

Cette réponse, non motivée par des éléments de fond, semble particulièrement difficile à comprendre à deux égards.  
 

1) Difficile à comprendre compte tenu de la ligne de conduite pourtant claire et non équivoque affichée publiquement par le CNOM par l'intermédiaire de son Président, le Docteur Patrick BOUET, dans le quotidien "le Figaro" du 19.10.2017 (interview à la suite du présent article). 

Dans cette interview, le Président BOUET expose clairement la situation de souffrance avancée du médecin et son lien de causalité avec les multiples dérives du métier (hyperadministratisation,...) qui n'a pas bénéficié des réformes nécessaires au moment où il en avait besoin. 

"[...] depuis trente ans, les gouvernements de droite comme de gauche évitent toute réforme courageuse, se limitant à colmater les brèches d’un système de santé qui va droit dans le mur ».

Ainsi, la nécessité d'agir promptement pour résoudre cette situation intenable, s'aggravant sous l'effet d'un statu quo trop longtemps pratiqué, ressort de l'interview.

"Notre système de santé est au bord de l’explosion, [...] les médecins ont besoin d’être reconnus dans le métier, [...] et d’être protégés dans leur exercice."

Partant, le diagnostic est clair. Le passage à la thérapie l'est moins, ce que laisse penser le courrier reçu, 1 mois à peine après cette intervention médiatique, refusant d'initier une action en vue d'obtenir la prescription de l'action disciplinaire. 

Car, si l'imprescriptibilité de l'action disciplinaire n'est évidemment pas la première cause responsable de la souffrance du médecin, son maintien n'est pas de nature à aller dans le sens d'une amélioration, accentuant la course menant le système de santé "droit dans le mur".

A contrario, la prescription de l'action disciplinaire ne pourra que concourir au mieux-être des médecins, effaçant une des multiples causes responsables de son épuisement, et ce d'autant plus lorsque l'obtention d'une réforme se ferait à moindre effort. 

2) Difficile à comprendre eu égard à la conjoncture actuelle, ultra favorable à l'obtention d'une réforme de l'imprescriptibilité. Rappelons-le, tous les voyants sont au vert:

-  un problème manifeste (pour un bref rappel du problème d'imprescriptibilité : lien), une solution simple et éprouvée par d'autres corps professionnels (pour un état comparatif entre professions : lien); 

-  une collaboration avec le corps des avocats actée, apportant son soutien et une réflexion déjà bien amorcée (sur l'imprescriptibilité de l'action disciplinaire frappant l'avocat : lien)

Maître Yves MAHIU, Président de la Conférence des Bâtonniers : "La conférence des Bâtonniers initie actuellement une réflexion portant refonte globale de la procédure disciplinaire des avocats. Nous ne verrions que des avantages à partager cette réflexion avec le CNOM." (sur la collaboration avec le corps des avocats - lien) ; 

-  une réceptivité de l'interlocuteur ministériel (nouveau, comprenant les enjeux, et enclin au dialogue comme mentionné par le Président BOUET dans l'interview du quotidien "le Figaro"). 

Évidence, faisabilité, timing, coûts temporel, humain, et financier: quel que soit l'angle d'approche, tous les paramètres concordent pour justifier une intervention immédiate et proscrire l'attentisme.

Dans un tel contexte, les médecins attendent un signal positif et une action concrète de l'autorité ordinale. Si le CNOM ne semble pas vouloir profiter de la fenêtre de tir, un surcroît d'efforts à l'échelle départementale fera peut être entendre raison au national. 

Rien n'est joué. 

Interview du Docteur Patrick BOUET, Président du Conseil National de l'Ordre des Médecins

Courrier adressé au Docteur Patrick BOUET, Président du Conseil National de l'Ordre des Médecins

Réponse du Docteur Patrick BOUET, Président du Conseil National de l'Ordre des Médecins